Outre-mer. Des manifs contre la précarité ont eu lieu hier.
La Réunion, correspondance Laurent DECLOITRE
Le 6 mars 2009
Alors que les Guadeloupéens reprennent le chemin du travail, les Réunionnais étaient à leur tour dans la rue hier pour manifester « contre le chômage, la précarité, les bas salaires, la vie chère » : 20 000 personnes à Saint-Denis et 15 000 à Saint-Pierre dans le sud de l'île selon les organisateurs (8 000 et 4 000 selon les forces de l'ordre). Sans conteste, une mobilisation réussie. La grève générale, lancée par le Collectif des organisations, syndicats, partis et associations de La Réunion (Cospar), a entraîné de fortes perturbations dans les transports publics, les écoles, les installations portuaires...
Gros zozos. Dans le défilé, qui se déroule devant les rideaux baissés des commerçants du chef-lieu, les syndicats de salariés sont fortement représentés, mais aussi les étudiants, les chômeurs, les retraités... « Gro zozo na stek frite, ti colon la moru griyé* », brandit un manifestant, pour dénoncer, en créole, les inégalités de revenus à La Réunion, où 52% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, où un jeune sur deux est au chômage.
A l'instar du LKP guadeloupéen, le Cospar, qui regroupe 46 organisations, dont l'ensemble des partis de gauche, réclamait « des mesures d'urgence sociale ». Ses membres ont exprimé « une certaine satisfaction » après avoir rencontré le préfet. Pierre-Henry Maccioni a promis une baisse du prix de la bouteille de gaz et des carburants. Concernant la diminution de 20% du prix des produits de première nécessité et la baisse des loyers sociaux, autres revendications du Collectif, le préfet s'est montré plus vague. Le représentant de l'Etat jouera le rôle de « facilitateur » avec la grande distribution et les bailleurs sociaux. L'augmentation de 200€ des bas salaires, des retraites, des minimas sociaux et des bourses d'étudiants ? « L'Etat apportera 100€ comme aux Antilles », assure le préfet. Les entreprises et les collectivités devront compléter. Mais voilà, la présidente UMP du conseil général a d'ores et déjà dit « niet ». Nassimah Dindar, dans un entretien au Quotidien de La Réunion, a expliqué que « le Département n'a ni vocation, ni les moyens de compléter les rémunérations de personnes qui travaillent déjà ». Quant à la Région, même si son président, Paul Vergès, est venu soutenir les manifestants, il ne s'est pas engagé sur ce point. Le Medef, enfin, vivement critiqué par les grévistes, a jusqu'à présent affirmé qu'il fallait « choisir entre les salaires et l'emploi ».
Galets. De ce défilé, Anise est repartie « déçue ». « Encore des paroles, regrette cette mère qui élève seule quatre enfants. Je n'ai même pas les moyens de leur offrir une glace ou d'aller à la plage ». Anise manifestera mardi, le Cospar ayant appelé à une nouvelle journée de grève, reconductible, et à des « actions coups de poing ». Hier après-midi, une partie des grévistes n'a pas eu la patience d'attendre et a investi un hypermarché, qui a dû fermer ses portes. Au même moment, d'autres manifestants bloquaient la route du littoral, qui relie le nord et l'ouest de l'île ; ils ont été délogés à coups de bombes lacrymogènes, tandis que des jeunes encagoulés jetaient des galets sur les forces de l'ordre. « Pourvu qu'on ne renouvelle pas ici l'expérience de la Guadeloupe », s'inquiète un syndicaliste...
* « Les riches mangent de la viande, les pauvres se contentent de la morue »
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