Le cyclone a mis en évidence les disparités entre le nord et le sud de l'île.
Par Laurent DECLOITRE, Saint-Pierre (la Réunion) envoyé spécial
jeudi 1er mars 2007
Sous les serres en lambeau, les melons et poivrons pourrissent déjà. Denis Hoarau, maraîcher à la Ravine-des-Cabris, dans le sud de la Réunion, estime à «environ 100 000 euros» les dégâts causés par le cyclone Gamède. Les haies de poivriers n'ont pas suffi à protéger ses cultures des rafales de 150 km/h qui ont soufflé mardi sur l'île. Partout, les bords des routes sont encombrés de végétaux, que les Réunionnais, armés de coupe-coupe, charrient de leur jardin. François Baroin, les pieds dans la boue, évoque le dispositif de calamité agricole, en sus de l'état de catastrophe naturelle. Le ministre de l'Outre-Mer, arrivé et reparti avec le cyclone, a pu se rendre à Saint-Pierre hier matin, à bord d'un appareil de l'armée de l'air, les routes étant toujours largement impraticables, malgré la levée de l'alerte rouge. Dans le Transall, sept tonnes d'eau minérale, destinées aux habitants du Sud coupés du reste du département depuis qu'un pont s'est effondré. Surprise : après quelques turbulences, l'avion se pose sous le soleil.
Gamède s'est bel et bien envolée. Une douche froide attend pourtant le ministre. Les maires UMP du sud de l'île lui reprochent le «déséquilibre structurel» dont ils seraient victimes. Depuis un mois, les habitants sont privés d'irrigation et d'eau courante. Un éboulis d'un million de m3 a obturé un captage il y a quelques semaines. Gamède a entraîné les mêmes causes : 73 000 foyers étaient toujours sans eau hier après-midi et 12 000 sans électricité. «Le cyclone est révélateur de notre fragilité, on ne peut pas laisser 40 % de la population réunionnaise dans cette situation !» déplore Didier Robert, maire du Tampon. «Nous avons quinze ans de retard sur le Nord», lance Michel Fontaine, le maire de Saint-Pierre. Et d'implorer une «décision politique». Peine perdue. Baroin renvoie à plus tard le débat de fond et souhaite gérer les «urgences».
Un pont aérien est mis en place entre le Nord et le Sud. Hier, de nombreuses stations-service étaient à sec. Des convois exceptionnels, transportant du matériel électrique... et les ordures ménagères ont pu franchir un pont resté debout mais fragilisé et toujours interdit à la circulation.Trois convois de 120 camions chacun ont bravé la «route du littoral» fermée, dont les éboulis causent régulièrement des accidents mortels, pour acheminer du charbon, de l'essence et des marchandises de première nécessité. Cette nuit, un A340 devait atterrir avec à son bord trois usines de traitement d'eau, du matériel de tronçonnage et 60 sapeurs-sauveteurs. En attendant, les prix des denrées alimentaires sont gelés durant une semaine, pour éviter la valse des étiquettes, courante après chaque cyclone. Un premier bilan fait état de deux morts. Une caissière de 45 ans qui a tenté de franchir une route submergée, et un jeune homme de 28 ans, qui a enfreint l'interdiction de sortir en alerte rouge.
Commenter cet article