La candidate à l'investiture du PS entame sa visite sur l'île des DOM-TOM.
Par Laurent DECLOITRE, La Réunion correspondance
Vendredi 13 octobre 2006
Rien de tel qu'un déplacement loin de ses bases pour oublier ses soucis. Surtout quand il se fait en terrain conquis. «Elle réalisera ici l'un de ses plus beaux scores», a d'emblée rassuré Gilbert Annette, responsable de la fédération socialiste de la Réunion, où Ségolène Royal est depuis hier en visite pour deux jours. Les voix des militants étant acquises, la candidate à l'investiture a pu se consacrer à son exercice préféré en s'adressant à l'opinion réunionnaise et ses 483 000 électeurs plutôt qu'au microcosme.
Proverbe créole. L'enjeu est de taille : le département pèse à lui seul plus lourd que l'ensemble des Dom-Tom. Un sondage Ipsos paru dans la presse locale donne, dans l'optique du second tour, Ségolène Royal vainqueur à 57 % contre Nicolas Sarkozy, et à 63 % contre Dominique de Villepin. Dans six mois, il faudra tout de même compter avec le président du conseil régional, l'infatigable Paul Vergès. A 81 ans, le leader historique du Parti communiste réunionnais n'a rien perdu de sa combativité et de son influence. La présidente de la région Poitou-Charentes ne s'y est pas trompée, réservant à son homologue l'une de ses premières rencontres de son séjour. Au siège du conseil régional, l'accueil fleuri est chaleureux. Mais Paul Vergès se garde bien d'apporter son soutien. «Il ne faut jamais faire la boue avant la pluie», sourit-il, matois, employant un proverbe créole pour signifier qu'il va prendre son temps. «Nous allons bâtir notre propre programme et le soumettre aux différents candidats», annonce-t-il. Et Ségolène Royal contrainte d'approuver cette «démarche respectueuse de la démocratie participative» qui lui est chère. Les précautions de son hôte n'ont pas empêché Ségolène Royal de souligner qu'elle partageait ses préoccupations : «La République a manqué à sa parole à la Réunion. L'Etat ne garantit plus les conditions d'un développement équitable», a-t-elle insisté en dénonçant «le taux de chômage trois fois plus élevé qu'en métropole» ou encore «l'énorme problème de réussite scolaire».
«Matière grise». Pour faire face à l'ensemble de ces «handicaps insulaires», la candidate a exhorté les Réunionnais à mobiliser «la matière grise» lors de sa visite de l'incubateur de la Technopole de Saint-Denis. «Allez les femmes !» a ensuite lancé la candidate à deux jeunes Réunionnaises, soutenues par une couveuse d'entreprises : l'une organise des mariages, l'autre lave des engins de chantier. Des femmes, Ségolène Royal en a rencontré des moins chanceuses, à Saint-André, dans l'est de l'île. Battues, sans toit, elles sont hébergées par l'association Papa momon léla : «Je ne suis pas au courant de la politique, mais j'ai l'impression qu'en tant que femme, elle ressent davantage ce qui nous est arrivé», glisse, timide, Marie-Céline Rivière, battue par son gendre, et à la rue depuis un mois. «J'aimerais bien qu'elle devienne Présidente.» C'est toujours ça de pris pour le moral.
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