Avec la fin du blocus sanitaire, l’archipel de Nosy Be fait face au retour des touristes occidentaux attirés par la prostitution, notamment de mineures. Une activité peu contrôlée par l’Etat et souvent perçue comme la seule solution par des familles engluées dans la pauvreté.
Libération du 23 septembre 2022
Laurent DECLOITRE, envoyé spécial
Durant plus de deux ans, l’archipel de Nosy Be, au Nord-Ouest de Madagascar, a été « coupé du monde ». « Aucun bateau de croisière, aucun avion », soupire Élisabetta Gravellino, propriétaire italienne d’un bed&breakfast et présidente de l’office de tourisme. Les autorités malgaches voulaient préserver du Covid la première destination du pays. En 2019, Nosy Be concentrait plus de la moitié des touristes étrangers, 200 000 pour 350 000 sur l’ensemble de Madagascar. Le blocus sanitaire vient de prendre fin et le flot de touristes déferle à nouveau, avec sa face peu reluisante : la prostitution et l’exploitation sexuelle des enfants. La perle de l’océan Indien de 321 km2 et d’environ 50 000 habitants est en effet un haut lieu du tourisme sexuel. Selon le centre Vonjy, qui vient en aide aux enfants victimes d’abus, 40% des jeunes filles de Nosy Be ont eu leur « premier rapport dans la prostitution » ! Voire 45% d’après une enquête de 2019 de l’université sud-africaine du Kwazulu Natal sur le « sexe transactionnel ».
Durant le Covid, Héva*, tresses nouées en chignon, a dû s’adapter. « Je n’avais plus de travail. Alors je suis partie sur Mada », raconte la prostituée de 23 ans qui vend des paréos et propose des massages aux touristes sur la plage d’Ambatoloaka, la station balnéaire de l’île. Madagascar est à 2h de traversée en bateau à moteur. Là, Héva a sué sang et eau pour couper au « couteau » (machette) des arbres servant d’échafaudages de construction. « Je restais dans la forêt, au milieu des makis [lémuriens] et des serpents, il n’y avait que de l’eau saumâtre à boire.» Un travail épuisant qui lui a permis de survivre durant l’épidémie. D’autres filles ont troqué la mini-jupe pour le tablier et vendu « de la soupe et des brioches », d’autres encore sont retournées en « brousse », au centre de l’île, chez leurs parents agriculteurs, pour cultiver manioc et bananes.
Certaines ont dû se résoudre à descendre d’un cran... Lire la suite sur Libé.
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