Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
L'actu vue par Laurent DECLOITRE

L'actu vue par Laurent DECLOITRE

Les articles de Laurent Decloitre (journaliste et biographe) sur la Réunion et l'océan Indien parus dans Libération, Marianne, Paris Match, l'Express, Géo et la presse nationale.

Publié le par Laurent DECLOITRE
Publié dans : #Articles parus dans Libération
A Mamoudzou, le 28 avril 2023. (Patrick Meinhardt/AFP)

A Mamoudzou, le 28 avril 2023. (Patrick Meinhardt/AFP)

Dans un département en proie à l’insécurité et paralysé par des barrages, nombreux sont ceux à envisager l’exil. A la Réunion, les acteurs de terrain disent prendre en charge de plus en plus de Mahorais depuis l’opération Wuambushu, visant à enrayer, en vain, la spirale de violence qui embrase Mayotte.

Libération du 7 février 2024
De notre correspondant,
Laurent DECLOITRE

Ahmed marchait près de l’hôpital de Mamoudzou, le chef-lieu de Mayotte, lorsqu’un gamin de 8 ans lui demande une cigarette. Puis un euro. Ahmed refuse et s’éloigne. Il est alors rattrapé par une bande d’une dizaine de jeunes, avec «deux chiens et des machettes». Le trentenaire poursuit son récit, depuis un parking de la cité de la Chaumière, à Saint-Denis de La Réunion, où il a déménagé en décembre 2022 : «Ils m’ont fouillé, me menaçant de m’égorger si je bougeais.» Ses agresseurs lui volent deux téléphones portables et 200 euros en liquide. «Depuis ce jour, raconte l’électricien de 34 ans, je n’ai eu qu’une envie : quitter Mayotte. Ça tombait bien, ma compagne en rêvait.» Depuis son arrivée à La Réunion, le couple respire enfin : «C’est 100 % tranquille ici, personne ne m’embête.»

Combien sont-elles, ces familles qui fuient Mayotte en raison de l’insécurité hors norme qui y sévit ? Selon l’Insee, «Mayotte est une terre d’émigration» et le solde migratoire déficitaire s’accroît d’année en année : 26 000 départs, principalement vers la métropole, entre 2012 et 2017, contre 15 000 entre 2007 et 2012. Des chiffres qu’une enquête de l’institut, parue en février 2022, relativise pour la destination Réunion : chaque année, entre 2015 et 2019, seulement «550 résidents de Mayotte» se sont installés à La Réunion, 680 en 2020. «Un flux marginal au regard de la population de l’île», analyse Jamel Mekkaoui, chef d’étude à l’Insee, qui ne correspond pas au ressenti des Réunionnais.

«Un ras-le-bol de la délinquance»

En effet, à en croire les multiples intervenants qui accompagnent les nouveaux arrivants, «les familles mahoraises sont de plus en plus nombreuses». «Depuis un an, je rencontre beaucoup de femmes avec enfants qui fuient la délinquance de leur île», témoigne Roni Bouer, bénévole à l’association de La Chaumière. La date correspond à l’annonce du lancement de l’opération Wuambushu par le gouvernement, visant à enrayer, en vain à ce jour, la spirale de violence qui embrase Mayotte. Depuis, Rayanti Youssouf Ahmadi, traductrice pour le compte de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, a elle aussi constaté une augmentation des arrivées de migrants comoriens et mahorais. «L’autre jour, une maman m’a raconté qu’elle n’était jamais sûre de voir son enfant revenir sain et sauf de l’école»… A Mayotte, les bus scolaires sont régulièrement caillassés, les établissements scolaires vandalisés, voire pris d’assaut par des bandes armées. Depuis plusieurs jours, l’île est paralysée par des barrages routiers et des batailles rangées opposent jeunes et forces de l’ordre. Au moins un millier de manifestants se sont réunis mardi à Mamoudzou, pour protester contre l’insécurité.

«Depuis deux ans environ, estime Viviane Ben-Hamida, directrice du Centre académique pour la scolarisation des enfants allophones, les arrivants justifient leur décision par «un ras-le-bol de la délinquance, alors que la recherche d’un meilleur système scolaire était jusqu’alors invoquée». La semaine dernière, l’ancienne enseignante... (Lire la suite sur Libération)

 

Commenter cet article

Hébergé par Overblog