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L'actu vue par Laurent DECLOITRE

L'actu vue par Laurent DECLOITRE

Les articles de Laurent Decloitre (journaliste et biographe) sur la Réunion et l'océan Indien parus dans Libération, Marianne, Paris Match, l'Express, Géo et la presse nationale.

Publié le par Laurent DECLOITRE
Publié dans : #Articles parus dans Libération
Jean-Luc Mélenchon, avec la présidente de région Huguette Bello, samedi à Saint-Denis. (B.Doudaine)

Jean-Luc Mélenchon, avec la présidente de région Huguette Bello, samedi à Saint-Denis. (B.Doudaine)

Lors d’un meeting samedi à Saint-Denis, le candidat de La France insoumise a longuement commenté la guerre en Ukraine, taclant au passage la politique étrangère d’Emmanuel Macron, avant de dérouler son programme économique et social.

Libération du 28 février 2022
De notre correspondant Laurent DECLOITRE

D’abord, le sourire. A sa descente d’avion, jeudi matin à la Réunion, Jean-Luc Mélenchon apprend qu’il a enfin dépassé les 500 parrainages, en partie grâce au soutien de plusieurs élus du département d’outre-mer. L’insoumis est un habitué de l’île, où il engrange parmi ses meilleurs scores. A la présidentielle de 2017, il est même arrivé en tête au premier tour, avec 24,5 % des voix, devant Marine Le Pen et Emmanuel Macron.

Le sourire, mais aussi et surtout la gravité. Pendant le vol vers l’océan Indien, Poutine a déclaré la guerre à l’Ukraine. Aussi, lors d’un meeting samedi à Saint-Denis, point d’orgue d’une visite de quatre jours, Mélenchon a-t-il consacré une grande partie de son discours à la crise internationale.

L’urgence d’un «désarmement nucléaire»

Sans surprise, le candidat a dénoncé l’invasion russe, tout en pointant les responsabilités : «Depuis 2014, je répète qu’on n’humiliera pas durablement la Russie en continuant à faire avancer l’Otan à toutes ses portes.» Et de condamner la «pax americana» à laquelle la France se résoudrait. «Nous n’avons rien à faire dans cet équipage, l’Otan, c’est le camp des vaincus, de ceux qui ne tiennent pas parole. Une autre alliance est nécessaire, une autre France doit s’avancer sur la scène internationale, une France non alignée, une France altermondialiste.» En lieu et place, «on fait les fiers à bras», a-t-il tancé, en référence à la livraison «additionnelle d’équipements de défense» aux Ukrainiens par la France. «Ah bon ! Vous avez réellement l’intention de vous fourrer dans ce nid de frelons ? La France ne doit pas concentrer l’essentiel de ses efforts à aller de l’un à l’autre, à exciter l’un et l’autre, en disant qu’elle est prête à se battre comme l’a fait le président Macron, qui a garanti l’intégrité physique de l’Ukraine.» Résultat, selon Mélenchon : l’Ukraine fait appel à Israël pour mener une médiation avec les Russes, pas à la France, qui préside pourtant le Conseil de l’Europe. «Une leçon humiliante !»

Pour le candidat, le plus urgent est d’exiger un cessez-le-feu «immédiat», dans le cadre d’une conférence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il demande dans un même temps d’accepter des discussions «sur les conditions de sécurité de la Russie», mais aussi sur celles de la France, refusant que des missiles de moyenne portée puissent être installés entre «500 et 5000 km» de l’Hexagone. Le prélude à sa volonté de relancer le désarmement au niveau mondial. «Les Russes et les Américains possèdent chacun 6 000 ogives nucléaires, la France 340. C’est trop, une seule suffit !» Pour Mélenchon, «le désarmement nucléaire est une urgence. Nous aurons des alliés dans le monde entier. A peine 10 pays ont l’arme nucléaire, tous les autres trinquent. Je me fais fort de trouver au moins 170 pays d’accord pour dire “ça suffit”». Dans le mille : dimanche, alors que ses troupes au sol semblaient à la peine dans leur offensive contre l’armée ukrainienne, Vladimir Poutine annonçait «la mise en alerte» de la force de dissuasion nucléaire russe, Washington dénonçant immédiatement une escalade «inacceptable».

«Les forces de l’argent et de la haine»

Après la diplomatie, place à l’économie et au social, où le candidat insoumis se sait attendu. Devant plus de 2000 militants, ses soutiens locaux se sont succédé pour dérouler son programme. La députée (divers gauche) Karine Lebon a évoqué la création de 240 000 emplois dans les Ehpad, 100 000 dans les hôpitaux, 60 000 dans l’éducation, autant dans la justice… Et rappelé la promesse d’un smic à 1400 euros net – «Fini, les salaires de misère !» – ou encore la retraite à 60 ans. Enflammée, Huguette Bello, présidente LFI du conseil régional, a lancé un «No pasarán !» devant une foule de drapeaux tricolores. Elle vise «les vendeurs de fumée, les chargeurs d’eau», expressions créoles pas vraiment flatteuses, pour désigner «les forces de l’argent et de la haine». Autrement dit, «Macron qui s’accommode de ce que l’outre-mer regroupe les régions les plus pauvres de l’Union européenne». «Pourtant, rappelle Younous Omarjee, député européen LFI, la France en est la deuxième puissance économique.» A gauche toute, à nouveau, avec Jean-Hugues Ratenon. Le député LFI de la Réunion dit «non à la France égoïste qui abandonne une partie de son peuple, piégé par les nantis et les faiseurs d’exclusion». La faute au capitalisme néo-libéral, la faute au marché.

Mélenchon y oppose l’interventionnisme d’Etat, «la planification», et évoque notamment le blocage des prix. «Le préfet de la Réunion fixe le prix de 153 produits de première nécessité avec l’aide de citoyens tirés au sort. Je généraliserai la mesure dans l’Hexagone !» Le prix des carburants sera également contrôlé, Mélenchon promettant à ce sujet que Total allait «passer à la caisse». Salve d’applaudissements encore, quand il annonce que l’Etat financera la fin des travaux d’un viaduc sur mer, très attendu des automobilistes réunionnais entre l’ouest et le nord de l’île, ou encore la continuité territoriale, entre le département et la métropole, aujourd’hui prise en charge en partie par le conseil régional.

Comment financer toutes ces mesures ? «Une soirée de chiffrage» aura lieu «dans les prochains jours», promet-il. Giovanni, photographe, et sa fille Kim repartent «galvanisés» ; Michel, professeur des écoles, qui a voté Macron en 2017, ressort lui aussi convaincu. Il choisira Mélenchon au premier tour.

Jean-luc Mélenchon la réunion meeting LFI insoumis présidentielle
Mélenchon a prôné la "planification écologique". (B.Doudaine)

 

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