Capture-d-ecran-2014-05-02-a-18.02.36.pngVent de fronde dans l’académie de la Réunion… Quinze des vingt-quatre maires du département d’outre-mer ont annoncé jeudi 1er mai, dans un communiqué commun, qu’ils n’appliqueront pas la réforme des rythmes scolaires à la rentrée prochaine. Les élèves qu’ils accueilleront dans les écoles maternelles et élémentaires à partir du 22 août pourraient donc continuer à ne travailler que quatre jours par semaine. Pourtant, toutes les communes de France doivent mettre en œuvre la réforme Peillon, maintenue mais «assouplie» par le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Benoît Hamon, qui instaure quatre jours et demi d’école. Soit le mercredi matin ou le samedi matin face au tableau noir.

«Nous avons conscience d’être hors-la-loi», commente Stéphane Fouassin, maire de Salazie, un village enclavé dans un cirque montagneux. Le secrétaire départemental de l’UDI est à l’origine de ce coup de force, qui rassemble quatorze maires de droite et un édile du parti communiste réunionnais. «Cette réforme coûte excessivement cher, entre les transports supplémentaires et le financement des activités périscolaires. Or le gouvernement ne compense pas les dépenses à l’euro près. On devrait augmenter les impôts, alors qu’on a promis le contraire lors de la campagne», avoue sans détour l’élu.

Dans sa commune de 7600 habitants et d’un millier d’élèves, la «refondation de l’école» entraînerait un surcoût de 170 000 euros, l’État versant «seulement» 45 000 euros en contrepartie.

L’annonce par le gouvernement d’une baisse de la dotation globale de financement des collectivités locales (11 milliards d’euros en moins sur trois ans) a précipité la décision des quinze maires ; ils envisagent aujourd’hui d’intenter une action en justice contre l’État au prétexte que la réforme des rythmes scolaires serait anticonstitutionnelle.

Thierry Terret, le recteur de l’académie, ne veut pas croire au jusqu’au-boutisme des élus. «La réforme instaure cinq matinées de cours obligatoires. Les maires n’ont rien à dire sur ces horaires, qui ne relèvent pas de leur compétence. Il serait impensable qu’ils ne respectent pas la loi». Et de rappeler que les communes ont jusqu’au 6 juin pour choisir définitivement de travailler le mercredi matin ou le samedi matin. Le patron de l’académie reconnaît cependant que les maires ne sont pas obligés d'organiser des activités périscolaire sur une ou plusieurs après-midi.

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En août 2013, seules quatre communes de l’académie (trois socialistes, une communiste) avaient expérimenté la réforme. Saint-Denis, le chef-lieu, 140 000 habitants, avait renoncé, face à l’opposition des enseignants, soutenus par les parents d’élèves, de travailler une demi-journée en plus. «Je comprends le cri d’alarme de mes collègues maires, indique Gilbert Annette (PS). Moi aussi, j’aimerais bien que l’État pérennise ses aides (1). Mais c’est une question de priorité et de choix politique.» Sans attendre la réforme, le maire a «réduit d’autres lignes budgétaires» pour que les jeunes Dionysiens pratiquent l’anglais, la natation, le yoga, les échecs… Aujourd’hui, Gilbert Annette n’a pas encore décidé si les élèves plancheront le mercredi ou le samedi, mais il appliquera «sans état d’âme» la réforme à la rentrée d’août.

(1) L’État a promis de verser une dotation d’amorçage de 50 euros par élève en 2014-2015, sans rien préciser pour les années suivantes.

Laurent DECLOITRE LA RÉUNION, de notre correspondant