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L'actu vue par Laurent DECLOITRE

L'actu vue par Laurent DECLOITRE

Les articles de Laurent Decloitre (journaliste et biographe) sur la Réunion et l'océan Indien parus dans Libération, Marianne, Paris Match, l'Express, Géo et la presse nationale.

Publié le par Laurent DECLOITRE
Publié dans : #Articles parus dans Libération
Sous la lave, des poissons inconnus
Biodiversité. A la Réunion, découvertes d’espèces après l’éruption du piton de la Fournaise.

Par Laurent Decloitre
Samedi 7 juillet 2007
    
Yeux globuleux, écailles brunes. Ce poisson d’une dizaine de centimètres n’a rien d’impressionnant pour le pêcheur du dimanche. «Mais si!, frétille l’ichtyologiste Jean-Claude Quéro, la nageoire dorsale est au niveau des yeux !» Une aberration de la nature chez ce genre de rascasse. De quoi convaincre le spécialiste que l’animal qui flotte dans son bocal d’alcool est une espèce jusque-là inconnue dans le monde. «Il faut être prudent, poursuivre les recherches bibliographiques, confronter avec les collègues russes, américains, australiens, sud-africains.» pré cise le septuagénaire. Avant d’ajouter, sans cacher son excitation : «Mais j’y crois !»

«Hallucinantes».  A 71 ans, Jean-Claude Quéro a été tiré de sa retraite en Charente-Maritime par le Museum d’histoire naturelle de la Réunion. Il serait, en France, le seul spécialiste capable d’identifier les 300 poissons pêchés il y a trois mois dans des conditions incroyables. Le 2 avril, les coulées de lave échappées du piton de la Fournaise se jettent dans l’océan, à travers les forêts du Grand-Brûlé, dans le sud-est de l’île. Les Réunionnais sont habitués à cette scène magique. Les scientifiques, eux, restent bouche bée devant le spectacle de centaines de poissons agonisant «entre les bulles de gaz». Des poissons aux formes «hallucinantes», lâche Patrick Durville, embarqué sur un canot pneumatique. «Des yeux énormes, une bouche gigantesque, disproportionnée par rapport à la taille.», raconte ce biologiste de l’Aquarium de Saint-Gilles.
Une jambe dans l’eau, «pour faire demi-tour dès qu’on dépassait les 40 °C», le scientifique les a cueillis à l’épuisette, au point de contact entre la lave et l’océan. Certains spécimens étaient «complètement bouillis», d’autres remuaient encore faiblement. Un premier examen indique que les poissons viennent des abysses, peut-être de 500 mètres de profondeur, voire davantage. «Je n’ai jamais entendu parler d’un tel phénomène», confie Thomas Staudacher, le directeur de l’Observatoire volcanologique de l’île. Le géologue de la Maison du volcan, Alain Barrère, tente une explication à cette mortalité étrange : «Les matériaux incandescents des coulées ont pu dévaler très vite les pentes sous-marines», provoquant un choc thermique mais également des variations chimiques du milieu.

Décompte.  Pourtant, en 2004, lors d’une précédente éruption, Alain Barrère avait plongé au large d’une coulée et n’avait découvert aucun poisson mort. «Ce qui vient de se passer n’a aucun équivalent dans le monde», en conclut-il. Sur les 300 poissons recueillis, congelés, fixés dans du formol, et enfin conservés dans de l’alcool, il y aurait plus de 100 espèces différentes. Parmi elles, au moins une trentaine jamais observées à la Réunion, comme ce Phosichthyidae translucide et luminescent. Et quatre ou cinq poissons, inconnus de la communauté scientifique internationale ! Le décompte des écailles, des épines, les prélèvements de branchies. Rien n’y fait. Jean-Claude Quéro, qui épluche pourtant les bibliographies du monde entier depuis 1966, ne parvient pas même à situer la famille de cette friture a priori anodine de 2 centimètres, qui arbore une mâchoire en bec.
En temps normal, pour disposer d’une telle collection de poissons des profondeurs, il faut monter une mission sous-marine qui «coûte des fortunes», sans garantie de résultat. L’ichtyologiste avait participé en 1982 à une campagne océanographique de l’Ifremer (Institut français pour l’exploitation de la mer) autour de la Réunion. Les dragages et les chalutages n’avaient permis de ne récolter qu’une vingtaine d’espèces. Le volcan a été «beaucoup plus efficace et moins coûteux». Juste retour des choses : une fois le caractère historique de la découverte confirmée, un de ces poissons d’avril devrait se nommer Fournaisiensis.

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C
Un sacré numéro.<br /> Aujourd'hui, dans mon LIbé, siroté en même temps que mon premier café, un peu de tout. L'article sur les "poissons inconnus" ça c'est vivifiant. Mais tout ce qu'on découvre dans les pagezs du quotidien n'est pas d'une aussi belle eau. -- Une desesperate wife à nouveau partante pour une mise en ménage. Bof ! -- Interpréter l'adhésion d'un Kouchner à un gouvernement sarkozyen c'était facile, il y avait de la transgression, du cynisme pour l'impétrant et pour le grand manitou de la belle manipulation. -- Mais que penser d'un DSK s'il franchit la ligne. Est-ce de même nature transgressive ? Je ne saisis pas ce qu'est le FMI. Faudra que Libé en dise plus. -- Autre perle, le musée de Petersburg (Kentucky) : là c'est du lourd. J'ai lu les réactions, noté qu'il n'y avait pas autant de réactions impulsives et "peu documentées" que d'habitude. --------- Non franchement cette histoire de poissons volés aux grands fonds et portés à la lumière grâce aux fantaisies d'un grand volcan, là je rêve. Dis Monsieur Libé, tu nous montreras plein de belles photos de ces merveilles inconnues, tu feras plus d'articles sur ce sujet. Dis ? Samedi 07 Juillet 2007 - 13:26
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S
oui, mais…<br /> Ont-ils des "zoreilles" ces étranges poissons d'avril ? Samedi 07 Juillet 2007 - 14:37
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